Le nouveau livre de Michael Glover et Les Mitchell « Les animaux, entités d’expérience : théories et récits historiques » nous demande de rejeter l’anthropocentrisme et d’adopter l’action animale.

POINTS MAJEURS

  • Les animaux vivants et sensibles sont largement absents de l’histoire animale.
  • Nous n’avons pas réussi à respecter les autres animaux en tant qu’êtres sensibles animés de leur propre vie.
  • Les non-humains, tout comme les humains, essaient simplement de bien vivre et s’épanouir et être en sécurité.

La science montre clairement que de nombreux animaux non humains sont des êtres sensibles, dotés d’émotions, qui se soucient de leur propre bien-être et de leur qualité de vie ainsi que de ceux de leur famille et de leurs groupes sociaux. Depuis des décennies, nous savons que la vie intérieure de nombreux animaux est complexe, riche et profonde, et une nouvelle anthologie intitulée « Animals as Experiencing Entities: Theories and Historical Narratives » éditée par les Drs. Michael J. Glover et Les Mitchell font valoir sans conteste qu’il est grand temps d’utiliser ce que nous savons en leur nom et de leur permettre de vivre en sécurité et de s’épanouir dans un monde partagé. Je ne pourrais être plus d’accord avec les messages importants de ce livre historique.

Michael Glover et Les Mitchell expliquent que l’histoire animale a évolué au cours des quatre dernières décennies, mais à quelques exceptions près, les expériences historiques subjectives des animaux n’ont pas été incluses dans l’histoire animale. D’une certaine manière, la sensibilité des animaux est absente de l’histoire animale. Il était important de valider les expériences des animaux et raviver les souvenirs de ce qui leur est réellement arrivé. Parfois, la photographie de leurs expériences passées est fragmentaire, voire spéculative, mais dans d’autres cas, les expériences vécues sont très claires. En effet, nous pouvons reconnaître et replacer dans un contexte historique, les capacités expérientielles des animaux.

Avec des intérêts et des parcours académiques divers, Michael Glover et Les Mitchell sont des passionnés de nature et d’animaux.

Les expériences animales sont complexes. Les implications de la validation des expériences animales sont diverses. Il était important de réunir dans cet ouvrage des approches diversifiées et un mélange de théorie et d’histoire. Ainsi des auteurs prêts à réfléchir et à écrire de manière respectueuse, crédible et perspicace sur les expériences des animaux ont été soigneusement sélectionné.

Ce volume s’adresse aux historiens, ethnographes, éthologues, scientifiques de la vie, chercheurs en études critiques sur les animaux, défenseurs des animaux, décideurs politiques et toute personne intéressée par les animaux en tant qu’êtres vivants.

Lorsque le philosophe Jonathan Birch a récemment commenté « Animal Libération » de Peter Singer, il a noté que les mauvais traitements infligés aux animaux par l’humanité ne sont probablement pas tant liés au spécisme mais « au manque de respect des autres animaux ». Ce volume a pour but premier de faire comprendre que les animaux sont des individus sensibles avec leurs propres vies, émotions, expériences et systèmes sensoriels, qui, comme nous, humains, essayons simplement de bien vivre et de s’épanouir. Il est plus facile de respecter la vie des animaux si nous devenons curieux et validons leur vie comme étant intrinsèquement précieuse. D’une certaine manière, il s’agit de montrer que les animaux sont des entités sensibles dotées de leur propre vie.

C’est une anthologie diversifiée, en deux parties. La première théorise sur la vie intérieure des animaux. La seconde s’intéresse aux récits historiques qui incluent les expériences émotionnelles, sensibles et sensorielles des animaux. Les auteurs couvrent « la formation du moi culturel et émotionnel des animaux », le deuil animal en tant que réponse organique, la phénoménologie de la douleur animale individuelle en fonction des contextes, la théorie du point de vue animal, les histoires sensorielles des animaux, un essai poétique sur l’histoire du bétail selon le bétail, la désignation des grands massacres d’animaux de l’histoire avec un focus sur le massacre des corbeaux dans la colonie de Rangoon en 1920, la vie des chimpanzés Rose et Kambi, capturés en Guinée française et utilisés comme objets de recherche, l’action des animaux dans les archives coloniales, une méthode de recherche juridique non anthropocentrique. Des vues de cas d’animaux, et enfin un compte rendu critique des expériences probables endurées par les poneys britanniques entre 1700 et le milieu des années 1960.

Ce livre est avant tout une histoire animale qui inclut l’expérience des animaux. Et l’accent est mis sur la théorie. Les historiens ont été timides et même hésitants à l’idée d’inclure les expériences historiques subjectives des animaux. Mais les animaux méritent d’être inclus dans la façon dont nous nous souvenons et comprenons le passé. Il faut donc faire de la place aux animaux qui vivent, ressentent et expérimentent l’histoire. Des romanciers comme Eben Venter et J.M. Coetzee ont souvent fait mieux que les historiens en écrivant sur les animaux en tant que sujets émotionnels, et leurs écrits expriment l’empathie pour les animaux.

L’élitisme humain a été un obstacle important, avec le danger que les auteurs soient accusés d’« anthropomorphisme », même si des preuves et des arguments raisonnés étayent ce qui est avancé. Cette intimidation a longtemps eu un effet dissuasif sur la recherche, sur les chercheurs et leurs choix de carrière. Ce volume a aussi pour vocation d’encourager et soutenir les chercheurs qui se sont trop souvent censurer dans la prise en compte des émotions des animaux.

L’espoir de plus actions en faveur des animaux ?

L’ampleur des dommages causés aux animaux est normalisée et donne la nausée. Il est légal de tuer des animaux dans presque toutes les juridictions de la planète. Pour rappel, tout comme nous, les animaux veulent simplement être en sécurité, avoir des besoins primaires satisfaits, dans de nombreux cas ceux de leurs jeunes et de leurs proches, être en bonne santé et profiter de leur vie. Plus on devient curieux et à l’écoute des capacités, des systèmes sensoriels et de la vie sociale des animaux, plus ils peuvent apparaître étonnants, enchanteurs et miraculeux dans notre conscience et plus nous reconnaissons et respectons leur volonté de s’épanouir. Plus nous comprenons les animaux, plus nous pouvons devenir empathiques à leur égard.

Afin de nous désengager moralement de la responsabilité du mal que nous avons fait et continuons de faire aux animaux, nos sociétés les identifient souvent comme des objets, des êtres inférieurs, ou du moins comme remplissant un rôle pour lequel ils sont « naturellement » destinés, par exemple comme les « chevaux de bât » ou les « animaux d’expérimentation ». Mais comprendre les animaux et expérimenter le monde en tant qu’individus sensibles, les considérer en tant qu’individu à notre égal, provoque l’érosion de cette auto-illusion. Il est à espérer que ce livre pourra apporter une certaine contribution à ce processus et soutenir les changements d’attitude et les actions qui peuvent en découler.

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